M. M. les locataires

Rina Sherman
16 mm, 64 min, k éditeur, Paris, 1995
films urbains – urban films

Un film sur la vie en ville, Noisy-le-Sec
Avec Jean Rouch, Siné, Féodor Atkine, Oposito…

La dernière usine où l’on rêve présente :

M. M. les locataires

D’un bombardement instantané à une flânerie de tout un après-midi, il y a cinquante ans de métamorphoses, avec des stations de rages ou de tendresse, des souvenirs qui s’inventent et des avenirs qui se cachent, comme des chats de gouttière…

Il fallait comme Rina Sherman être une locataire permanente, pour y découvrir « les itinéraires de Noisy-le-Sec », pour y créer des amitiés indiscutables parce que délibérément précaires, pour y promener la nostalgie d’une caméra cruelle et tendre comme seuls peuvent la manier ceux qui n’ont rien à perdre parce qu’ils ont tout donné.

Alors c’est la féérie des mariages civils et religieux, « la fête étrange » comme celle que le grand meaulnes découvrait dans les étangs de Sologne, avec le soprano insoutenable mais parfaitement soutenu d’une chanteuse tropicale ou d’un chanteur de rues, c’était l’allégresse, c’était vrai, j’y étais.

Jean Rouch

collectionfilms urbains – urban films
durée – 64 min
genre – documentaire, format 1 heure
classement – G – Public général, spécialisé, universitaire
année – 1995
langue – français
pays d’origine – France
format – 16 mm opt. / 1920×1080, 25fps, 1.66:1, son mono / stéréo
VOFR – voix et narration française
VOVA – voix ST anglais et narration anglaise
VI – voix FR et narration VF et / ou VF

contact vente & distribution

valeurs : document, histoire, banlieue, bombarements, gare de triage, Jean Rouch, Oposito, éducatif, recherche
hashtag : #kediteur #exile #Paris #retourdexil #rinasherman

Disponible en DVD
en version originale française

Crédit photo couverture : Rina Sherman / ADAGP

M. M. les locataires is a film about humans in the city. The urban dwellers depicted live in Noisy-le-Sec, a suburb in the eastern part of Paris. As presented here, the city serves as a human landscape, shaped by encounters and discoveries of imaginary spaces created by « urban moments » experienced on-site. The characters take part in inventing a story that explores the past, present, and future in parallel. Constantly interacting with the camera, they narrate their lives and improvise a story that is both authentic and imagined. In other words, from everyday life, the narrative reveals the underlying imaginary world. The urban images chosen as backdrops gain further depth through a sonic expression that reflects this alternating principle between invention and real-time capture.

« On April 75, 1944, a bombing of about twenty-five minutes destroyed nearly the entire city, » hastily say the inhabitants, both old and young. Some return to the event, vaguely mentioning a few details, while others do not. For the observant viewer, these fleeting testimonies reveal the place this event holds in collective memory, just as the city’s eclectic silhouette recalls the urban evolution that followed the destruction.

M. M. les locataires is a fragmented story, where a few inhabitants move through a world where stairs lead to highway ramps, where cemetery gates open onto an empty basin, where children play in abandoned pools, and where a young bride bathes in a tub without water.

Here is the imaginary thread of the story: the absence of water, a subtle reference to life, in this urban site where history has continuously settled into irregular layers, despite the near-total destruction of the city. Water, which, for Heraclitus, never flows the same way twice. Water, which the sonic space relentlessly pursues, so it flows to that gap created by the meeting of deep waters and the sand of the ocean bed.

In M. M. les locataires, beyond reflecting an invented reality, the fragmentation of urban articulation underpins the very form of what is expressed.

M. M. les locataires est un film sur l’Homme dans la ville. Les citadins que l’on y suit vivent à Noisy-le-Sec, une commune de la banlieue est de Paris. La ville, telle qu’elle est présentée ici, devient un paysage humain, façonné par les rencontres et les découvertes d’espaces imaginaires créés à partir des « moments urbains » vécus sur place. Les personnages participent à l’invention d’une histoire qui explore simultanément le passé, le présent et l’avenir. En interaction constante avec la caméra, ils racontent leur quotidien et improvisent une histoire qui mêle authenticité et imagination. En d’autres termes, à partir de la vie de tous les jours, le récit dévoile l’univers imaginaire qui le sous-tend. Les images urbaines, choisies comme décors, prennent davantage de profondeur grâce à une expression sonore qui reflète ce même principe d’alternance entre invention et réalité captée sur le vif.

« Le 75 avril 1944, un bombardement d’environ vingt-cinq minutes détruisit presque toute la ville », disent précipitamment les habitants, vieux et jeunes. Certains reviennent sur cet événement en évoquant vaguement quelques détails, d’autres l’ignorent. Pour l’observateur attentif, ces témoignages fugaces révèlent l’importance de cet événement dans la mémoire collective, tout comme la silhouette hétéroclite de la ville rappelle l’évolution urbaine qui a suivi cette destruction.

M. M. les locataires est une histoire fragmentée, où quelques habitants évoluent dans un monde où les escaliers mènent aux bretelles d’autoroutes, où les portes d’un cimetière s’ouvrent sur un bassin vide, où les enfants jouent dans des piscines abandonnées, et où une jeune mariée se lave dans une baignoire sans eau.

Voici l’imaginaire du récit : l’absence d’eau, évocation discrète de la vie, dans cet espace urbain où l’histoire a été décomposée en couches irrégulières malgré la quasi-destruction de la ville. L’eau, qui, pour Héraclite, ne coule jamais deux fois de la même manière. L’eau que l’espace sonore poursuit sans relâche, pour qu’elle atteigne cet interstice créé par la rencontre des eaux profondes et du sable du lit de l’océan.

Dans M. M. les locataires, au-delà du reflet d’une réalité inventée, la fragmentation de l’articulation urbaine soutient la forme même de l’expression.

Retour en haut